Conférence VRT : bus propres, quelle énergie choisir ?

Article publié le par Olivier Meyer

Echanges entre les intervenants de la conférence
Echanges entre les intervenants de la conférence
Bus propres conférence VRT

Ce jeudi 24 mars 2022, le magazine Ville, Rail & Transports a organisé à Paris une conférence « Motorisation des bus propres : Quelle énergie choisir aujourd'hui ? ». L'occasion de dresser un état des lieux des solutions existantes et aussi de se projeter vers les solutions d'avenir. Comme il n'existe pas de technologie universelle, un mix énergétique semble être la meilleure option.

La vision des exploitants

Deux représentants de sociétés qui exploitent des bus et cars sont venus partager leur vision durant cette conférence.

La RATP a présenté son programme Bus 2025 mis en œuvre pour le compte d'Île-de-France Mobilités. Il est composé de deux volets, un sur les bus et un sur les infrastructures. Près de 600 bus neufs ont été mis en service en 2021, essentiellement électriques ou fonctionnant au bioGNV. Concernant les bus électriques, un travail est fait sur l'interopérabilité entre les différentes bornes de rechargement et plusieurs modèles de bus.

Pour la réussite de ce programme, trois défis sont à relever : technique (maintien de l'exploitation des centres tout en faisant les travaux), humain (mobilisation de l'ingénierie, de la maintenance et de l'exploitation) et écologique.

La RATP a étudié le retrofit pour son parc de bus diesel en Île-de-France mais sans lui trouver un domaine de pertinence.

D'une manière générale, l'intervenant indique que chaque collectivité doit concevoir la transition énergétique en fonction de son territoire (coût et disponibilité de l'énergie…), avec une vision stratégique globale à long terme.

Keolis a dressé un panorama des bus propres exploités par le groupe et du support apporté par son centre d'excellence dédié à ce sujet. Le groupe est neutre vis à vis des technologies. Pour les projets de transition énergétique, les alternatives aux carburants fossile sont étudiées pour trouver une solution adaptée à chaque contexte, y compris en tenant compte des contraintes liées aux dépôts situés en zone urbaine. Ce travail est réalisé en partenariat avec les autorités organisatrices (AO), en adoptant une démarche systémique.

Le coût total de possession (TCO) est calculé pour évaluer chaque option. En France, le TCO d'une flotte de bus électriques est de + 15 % par rapport au diesel. Toutefois, l'augmentation récente du prix des carburants vient de donner l'avantage à l'électricité. Mais le contexte n'est pas partout le même. À titre d'exemple, en Suède, en raison de la forte part de production électrique par des éoliennes, les prix de l'électricité varient très fortement. Les outils de smart charging ont alors un intérêt majeur.

Keolis étudie aussi les solutions de retrofit à condition d'avoir un client partenaire, que l'accès aux données du véhicule soit facilité par le constructeur et que le partenaire industriel soit solide. Le domaine de pertinence du retrofit reste toutefois plutôt réduit.

Sur les 23 000 véhicules exploités par le groupe, 17 fonctionnent avec de l'hydrogène. C'est potentiellement le graal, la technologie est en voie de stabilisation. À Pau, le taux de disponibilité des véhicules est bon, mais la maintenance est coûteuse et le rendement énergétique est faible.

La vision des constructeurs

Les représentants de trois constructeurs d'autobus ont présenté leur stratégie à cette conférence.

Iveco a structuré sa gamme de bus propres avec des véhicules au biogaz (marque Iveco) et électriques (marque Heuliez). Le marché du car de tourisme a été très impacté par la crise sanitaire, mais la transition énergétique des flottes de bus n'a pas été freinée. Dans le domaine des poids lourds, le marché des bus et cars neufs fait figure de bon élève avec une proportion élevée de véhicules à faibles émissions.

Le constructeur abandonne la technologie full hybrid pour le mild hybrid offrant un meilleur TCO.

Iveco commercialise également des trolleybus à batteries (technologie IMC), une solution trop souvent mise de côté. Toutefois, le Sytral vient de lancer un appel d'offres pour 80 à 250 trolleybus pour remplacer une partie des Irisbus Cristalis et certains bus diesel.

Iveco indique avoir été sollicité par plusieurs sociétés souhaitant faire du retrofit. Le constructeur vend des kits de pièces aux industriels intéressés, mais ne porte pas ce type de projet.

Concernant l'hydrogène, le marché est actuellement concentré sur quelques appels à projet de collectivités de taille intermédiaire. Iveco explique avoir toutes les briques, le développement serait un projet de 2 à 3 ans. Toutefois, l'augmentation de la capacité des batteries réduit le segment de pertinence économique de l'hydrogène.

Volvo a détaillé sa stratégie axée sur l'efficience des motorisations électriques et l'utilisation des carburants alternatifs. Le constructeur propose des véhicules qui ne nécessitent pas d'infrastructures lourdes. Le Volvo 7900 est un bus hybride fonctionnant au biocarburant, classifié dans le groupe 1bis. Le véhicule est équipé d'un système d'irréversibilité B100. Ce bus peut circuler en tout électrique 50 % du temps.

Volvo Bus France accompagne ses clients dans l'électromobilité avec un centre d'expertise. Des outils de simulation d'exploitation tenant compte du vieillissement des batteries sont utilisés pour permettre à l'entreprise de prendre des engagements fermes.

Concernant l'hydrogène, le représentant de Volvo juge les coûts encore trop élevés et indique qu'il n'existe pas encore de pile à combustible bien adaptée aux poids lourds.

La société HCI est détenue partiellement par le constructeur turc Karsan depuis 2019. Elle distribue les véhicules de la marque Karsan. Les principaux véhicules commercialisés sont des bus et cars électriques de 6 et 8 mètres. Les batteries sont fournies par BMW. La recharge s'effectue avec des Wallbox en 4 heures. Par ailleurs, Karsan a développé un midibus à conduite autonome.

Le rôle des équipementiers

Voith est une entreprise fondée en 1867 pour réparer et améliorer les systèmes des usines de papier. Désormais, le papier est l'une des 3 branches d'activité. Dans le domaine de la mobilité, c'est l'activité transmission de puissance qui est connue avec la société Voith Turbo. L'entreprise produit la boîte de vitesses Diwa.

Des systèmes d'hybridation sont commercialisés, comme la boîte Diwa NXT (micro hybride) dotée de 3 vitesses supplémentaires, adaptée à l'interurbain. Un véhicule Iveco équipé de cette boîte devrait être disponible fin 2022.

La société a aussi développé le système Voith Electrical Drive System qui équipe les autobus électriques Otokar eKent et des modèles des carrossiers Wrightbus et Alexander Dennis.

La chaîne de traction Voith Electrical Drive System peut aussi être utilisée pour transformer un bus diesel en bus électrique. Un premier véhicule est en cours de transformation en Allemagne par un industriel.

Voith se positionne également sur le retrofit de bus diesel Euro 5 en biogaz Euro 6 en proposant une modification du logiciel de gestion de la boîte de vitesse. Voith est partie prenante du projet Ecol'CAR des Cars Berthelet et du CRMT, la conversion d'un Irisbus Crossway en autocar fonctionnant au biogaz. Le véhicule transformé répond à la classification 1bis des bus propres.

Voith développe actuellement un réservoir en fibres de carbone destiné à recevoir de l'hydrogène comprimé à 700 bars pour 700 à 800 kilomètres d'autonomie. Ce produit, prévu à l'horizon 2025, sera dans un premier temps destiné aux camions puis proposé pour les autocars.

La question du financement

NEoT Green Mobility a été créée en 2017 par Forsee Power et EDF pour accompagner le financement de la mobilité électrique. Depuis, d'autres investisseurs ont rejoint le capital.

La société de gestion travaille avec les fabricants sur les caractéristiques des batteries et avec les clients sur l'usage qui en sera fait. Des offres de financement pour les batteries avec des contrats de type battery as a service sont proposées en incluant une garantie de performance sur la durée (10 à 15 ans).

NEoT va développer une offre similaire pour les piles à combustible.

Au final, cette conférence a permis aux participants d'avoir un panorama actualisé des solutions pour décarboner les flottes de bus et cars. Une précédente édition avait eu lieu en mai 2021.

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